
Le marchand de biens : une profession complexe et mal connue (partie 1)
Les origines de la profession
Derrière le terme de Marchand de Biens se cache une profession à multiples facettes qui a beaucoup changé au fil du temps, non seulement du fait de l’évolution de l’histoire, mais aussi de l’évolution de la fiscalité et des mentalités.
De l’Ancien régime à nos jours
Sous l’Ancien régime, les Marchands de Biens revendaient à la découpe les domaines des nobles ruinés du fait des multiples guerres et famines. Lors de la Révolution, les biens du clergé saisis sont revendus dans des conditions parfois douteuses, faisant la fortune de certains. La fin du XIXème siècle et les grands travaux de Paris entrepris par le baron Haussmann voient arriver les premiers promoteurs immobiliers qui bâtissent des immeubles de rapport.
L’instauration de l’impôt sur le revenu en 1915, la guerre, la crise de 1929, entre autres, vont transformer les mentalités profondément. L’immobilier va suivre le mouvement.
A Paris, les anciennes fortifications sont démolies laissant place aux boulevards des Maréchaux et aux HBM (habitations à bon marché) ancêtres des HLM. Les immeubles de rapport commencent à se vendre à la découpe à la suite de la crise de 29 ; les hôtels particuliers des gens ruinés étant alors divisés en appartements. Le Marchand de Biens moderne, vendeur à la découpe d’immeubles, fait son apparition.
Une image dégradée
À l’inverse des pays anglo-saxon qui, historiquement, ont basé leur développement sur les échanges et le commerce notamment avec leurs colonies (on pensera aux Comptoirs des Indes), la France voit traditionnellement d’un mauvais œil le commerçant qui ne produit pas le bien mais qui l’achète en vue de le revendre. On peut y voir une influence du protestantisme et de l’anglicanisme, différents de la religion catholique dans leur vision des échanges commerciaux.
Au-delà des raisons socio-culturelles, l’image du Marchand de Biens souffre des crises que la France a connue au cours de ces 30 dernières années. Le début des années 90 a vu l’explosion d’une bulle immobilière et financière spéculative dans laquelle beaucoup de petits promoteurs et Marchands de Biens se sont engouffrés, y décelant un moyen de gagner de l’agent facilement. L’explosion de cette bulle en a laissé un grand nombre sur le carreau. La reprise du marché de l’immobilier au début des années 2000 a vu revenir des professionnels peu scrupuleux et des banques peu regardantes. Les mêmes causes ayant les mêmes effets, la crise des subprimes a eu, là aussi, des résultats dévastateurs.
L’accès à la profession
Sur un plan purement réglementaire, le métier de Marchand de Biens est un métier facile d’accès. Il n’est pas exigé de dipôme pour exercer la profession de Marchand de Biens. Contrairement aux agents immobiliers, par exemple, la profession n’est pas réglementée.
Le Marchand de Biens est un commerçant. Son activité consiste à faire de l’achat-revente de biens immobiliers. C’est donc un métier qui peut sembler facile d’accès. Toutefois, c’est un métier nécessitant de multiples compétences.
Le Marchand de Biens doit être technicien et capable de maîtriser les pathologies du bâtiment et les techniques de construction pour détecter les qualités et les défauts d’un bien.
Il lui faut être commercial pour négocier les biens au juste prix ce qui lui permettra, après les avoir mis en œuvre, de les revendre à un tarif lui permettant de se dégager une marge suffisante.
Il est indispensable de connaître les bases du droit de l’urbanisme pour monter un projet en toute légalité
Par ailleurs, il faut réaliser des dossiers bancaires complets non seulement pour présenter ce dernier au banquier, mais aussi afin d’être certain que l’opération envisagée est viable économiquement. Enfin, le Marchand de Biens doit maîtriser les notions de base de la comptabilité puisqu’il est un chef d’entreprise.
Le Marchand de Biens est une personne physique ou morale qui réalise à titre habituel des opérations d’achat et revente des biens immobiliers. L’administration fiscale est claire : il achète et vend. Il est donc un commerçant. Il ne réalise pas les travaux s’il y en a.
Dans le cas contraire, il deviendrait une entreprise du bâtiment ou un promoteur. Si tel est le cas, cela ne l’empêchera pas de réaliser l’opération prévue, mais la fiscalité appliquée à l’opération sera différente
Il faut noter que le caractère juridique de l’entreprise importe peu dans la mesure où c’est une entreprise qui fait l’opération.
Le Marchand de Biens étant un commerçant, un particulier ne peut pas réaliser d’opération de Marchand de Biens. Si ce dernier fait une opération d’achat-revente d’un bien, il devra être en mesure d’expliquer la raison pour laquelle il a revendu immédiatement le bien et il sera taxé au régime de la plus-value des particuliers, soit 19%.
Seul l’aspect récurrent est à prendre en compte. À partir de la 2ème opération d’achat revente dans un délai court ayant généré une plus-value, y compris pour une résidence principale, il pourra y avoir un contrôle de d’administration fiscale entrainant un redressement. Il est à noter qu’un contrôle fiscal peut porter sur les 3 dernières années plus l’année en cours. Un particulier voulant réaliser des achats- reventes de biens immobiliers, et qui ne veut pas être inquiété par le fisc, pourra donc faire une opération tous les 4 à 5 ans au mieux.
Le Marchand de Biens fait de la découpe de terrains à bâtir et de propriétés bâties en conservant la construction initiale ou en la démolissant si celle-ci ne présente pas d’intérêt..
Il réalise également des divisions et rénovations de biens bâtis, appartements, immeubles de rapport ou de maisons de toutes surfaces.
Il a aujourd’hui un grand rôle à jouer dans la rénovation thermique. Lors de la réhabilitation des logements, il peut être tenu de réaliser une mise à niveau de la réglementation thermique.
La profession de Marchand de Biens est donc très large.
L’activité de promoteur est, sur le plan du métier à proprement parler, très proche de celle du Marchand de Biens.
En effet les deux professions revendent des biens immobiliers après les avoir travailllés.
Le promoteur est en principe bâtisseur, alors que le Marchand de Biens est rénovateur.
On peut surtout différencier les 2 activités par la fiscalité. Le Marchand de Biens bénéficie, sous conditions, du régime fiscal spécifique de la TVA sur la marge et la promotion est assujettie au régime général de la TVA sur le prix total.
Tous les biens sont meubles ou immeubles (art. 516). Pour comprendre cette définition, on y opposera les droits qui sont immatériels et inaliénables (invendables).
Ainsi, l’air que nous respirons ne peut pas faire l’objet d’un commerce. Le plongeur sous-marin qui fait remplir sa bouteille d’air achète non de l’air qui ne peut faire l’objet d’un commerce, mais la prestation de gonflage. De même, l’eau de notre robinet n’est pas payante, c’est son acheminement et son traitement qui sont facturés.
Les biens sont immeubles par nature, par destination ou par l’objet auquel ils se rattachent (art. 517).
Un terrain est immeuble par nature (art. 518).
Les canalisations d’eau, égouts, etc. sont également immeubles (art. 523). Pour comprendre cet article, il faut admettre que les biens immeubles soient déplaçables sans être endommagés. C’est pourquoi l’article 525 stipule que les éléments scellés ou qui ne peuvent être déplacés sans être endommagés ou détériorés sont immeubles.
Une servitude est un bien immeuble (art. 526). Cela veut donc dire que celle-ci est rattachée à un bien et non à une personne, qu’elle soit physique ou morale.
Pour être meuble, un bien doit être déplaçable san sêtre endommagé (art. 528 à 531).
Qu’en est-il des briques et autres éléments scellés ? « Ils sont meubles jusqu'à ce qu’ils soient employés » (art. 532).
Ainsi, un ascenseur qui est mobile du fait de sa fonction sera un bien meuble jusqu'à son installation dans la cage d’ascenseur et, une fois en fonction deviendra un bien immeuble.
Les tables, chaises, etc. composant le mobilier d’une maison sont des « meubles meublants » (art. 535). On peut avoir sur les biens un droit de propriété ou de jouissance (art. 543). Par conséquent, un bien est une chose qui peut être achetée, vendue, ou louée.
Un bien est donc matériel au sens large du terme.
Le Marchand de Biens est un Marchand de Biens immobiliers.
Étant un commerçant, rien ne lui interdit d’acheter et de vendre des biens mobiliers. Mais dans ce cas, il sera un commerçant « classique » et ne pourra en aucun cas bénéficier des spécificités fiscales du Marchand de Biens.
La TVA est assujettie sur le prix de vente, cette dernière étant payée une seule fois par le consommateur final.
Le commerçant qui vend sa marchandise 100,00€ TTC doit inclure une taxe qui s’ajoute au prix de vente du bien (TVA) ou du service vendu à son client. C’est ce que l’on appelle la TVA collecté. Le taux de base de la TVA est de 20%. Selon le type de bien, le taux peut être différent. Ainsi, les biens dits de première nécessité bénéficient d’un taux réduit.
Celle-ci est payée par le commerçant au fisc. C’est ce que l’on appelle la TVA reversée.
Le Marchand de Biens bénéficie, sous conditions, d’un régime spécifique dit de la TVA sur la marge. Par dérogation au régime général, il devra reverser la TVA sur la marge réalisée. Ainsi pour un bien acheté 100€ et revendu 150€, soit avec une marge de 50€, la TVA sera appliquée sur 50 et non 150.
La valeur initiale ou vénale :
Dans notre exemple, le législateur a estimé que l’achat à 100€ correspond à la valeur vénale sur laquelle de la TVA a été déjà réglée et les 50€ correspondent à la prestation de mise en valeur du bien sur laquelle de la TVA est due.
les 3 modes de TVA du Marchand de Biens
LA TVA sur le prix de vente final La TVA sur la marge L’exonération de TVA
A. Acheter à des particuliers en vue de revendre à des particuliers.
Le vendeur ne devra en aucun cas pouvoir être assimilé à un professionnel. Le vendeur professionnel sera celui qui est assujetti à la TVA.
B. Le cas particulier de la SCI.
La SCI est une société civile et non commerciale. Mais le créateur de la SCI peut opter pour l’IRPP (impôt sur le revenu des personnes physiques) ou l’IS (Impôt sur les Sociétés).
Ainsi une SCI soumise à l’impôt sur les sociétés, même s’il s’agit d’une SCI familiale, sera considérée somme un vendeur professionnel.
C. Il ne doit pas y avoir de changement d’état entre l’achat et la revente.
Dans le cas inverse, la TVA sur le prix total sera appliquée. En reprenant notre exemple précédent, la base de calcul de la TVA collectée serait de 150€ et plus de 50€.
D. Le changement d’état est un changement juridique.
Le fait de rénover un logement (même en totalité) ne constitue en aucun cas un changement.
Il faut entendre par changement juridique une modification obtenue par une voie administrative : diviser un terrain à bâtir, obtenir un permis de construire, créer une copropriété.
Si le Marchand de Biens souhaite diviser l’immeuble qu’il achète, que ce soit en propriété ou en jouissance par le biais de la création d’une copropriété, ces modifications devront avoir été finalisées avant la réitération.
Les éventuels travaux de rénovation n’étant pas des changements d’état juridique, ceux-ci pourront être réalisés postérieurement à l’acquisition.
Par ailleurs « entre l’achat et la revente » veut dire entre les deux actes authentiques. Les compromis ne sont pas inclus dans cette définition puisqu’un compromis est un acte sous seing privé et non un acte authentique.
Pour comprendre ce principe il faut se référer au principe général du métier : l’objectif premier du Marchand de Biens n’est pas de construire, si tel est le cas il devient promoteur-lotisseur. Il est un commerçant qui fait de l’achat en vue de revendre. S’il apporte un changement d’état juridique postérieurement à l’acquisition, le statut de commerçant ne sera pas remis en cause, mais la fiscalité applicable sera différente. Le régime dérogatoire ne sera plus applicable et il reviendra au régime général de TVA sur le prix de vente global.
Il ne faut pas créer d’ambiguïté légale à ce sujet. Prenons l’exemple d’un petit immeuble bourgeois divisé familialement en plusieurs appartements occupés antérieurement par plusieurs membres d’une même famille :
La division physique existe mais légalement la copropriété n’a pas d’existence. Il sera nécessaire de créer une division juridique.
La période entre la signature du sous seing privé et la réitération par acte authentique devra être mise à profit pour réaliser et rendre définitive cette opération.
Le Marchand de Biens est, nous l’avons dit plus haut, un commerçant. Son activité consiste à faire de l’achat en vue de revendre. Il ne peut en aucun cas être réalisateur. Tous les travaux devront être sous-traités. Il ne peut en aucun cas effectuer les travaux lui-même : cela entraînerait un changement de statut : il deviendrait artisan ou entrepreneur du bâtiment.
Par exception, si le Marchand de Biens revend sans modification un bien bâti et achevé depuis plus de 5 ans, il sera exonéré de TVA.
Cela s’explique par le principe d’unicité de la redevance de la TVA dont nous avons parlé plus haut : on ne la paie qu’une seule fois.
Le délai de 5 ans est un garde-fou qui vient compléter la règle fiscale qui veut que l’opération de Marchand de Biens soit réalisée dans les 5 ans. En revanche, s’il n’y a pas de TVA due, il n’y aura pas de TVA récupérable. Les rénovations entreprises n’ouvriront pas droit à récupération.

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Publié le 26/12/2022 par
Stéphane BROUSSE
Passionné d'immobilier depuis 20 ans, je vous propose mes services pour vos projets immobiliers sur le secteur de Caluire et Cuire, Sathonay Camp, Sathonay Village et Rillieux-La-Pape